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Boîtes à fantasmes
lun. 21 sept.
|www.loeveandco.com
Loeve&Co-llect: Vingt-quatrième semaine. Chaque jour à 10 heures, du lundi au vendredi, une œuvre à collectionner à prix privilégié, disponible uniquement pendant 24 heures. Collectionner n'a jamais été aussi enrichissant...
Heure et lieu
21 sept. 2020, 09:59
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À propos de l'événement
Semaine 24 : Boîtes à fantasmes
Au Musée des Arts décoratifs de Paris, en 1967, l’exposition Bande dessinée et figuration narrative est la première tentative, en France, de présenter une histoire de la bande dessinée dans tous ses aspects : historique et esthétique dominent, mais la production et même la sociologie, procédés narratifs et structure de l’image. Alors que les planches originales ne sont pas encore perçues comme des œuvres d’art, les commissaires de l’exposition (Pierre Couperie, Claude Moliterni et Gérald Gassiot-Talabot) prennent le parti d’agrandir des cases ou des pages de bande dessinée et de les présenter telles des tableaux.
L’année suivante, le critique Gérald Gassiot-Talabot regroupe à Milan, à la galerie Il Georgio, sous l’appellation Groupe OPA de Paris, six peintres issus des marges de la Figuration Narrative, qu’il a précédemment définie : Peter Foldes, Yannis Gaïtis, Key Hiraga, Edgard Naccache, Michel Macréau et Hugh Weiss.
Aucun d’entre eux n’étant inféodé aux querelles parisiennes (ou new-yorkaises), tous tenants d’une figuration débridée, grinçante, caustique, ces peintres parviennent à amalgamer des tendances jusque-là considérées comme antagonistes : Expressionnisme, Surréalisme, Figuration Narrative, Pop Art…
Dans la lignée d’une poignée de grands artistes comme Peter Saul ou Bill Copley, ils n’hésitent pas à provoquer le rire, ni même à provoquer tout court, Copley allant jusqu’à affirmer : La question qui m'intéresse le plus dans la peinture – et c’est un problème difficile – est de trouver cet équilibre à 50-50 entre la forme et l'humour, que beaucoup de grands chefs-d'œuvre de la littérature sont parvenus à atteindre... La pierre angulaire de l'humour est le sexe, parce que le sexe est si violemment spirituel et si violemment physique en même temps... Vous riez d'un chiot ou du derrière d'une femme, non pas parce que c'est drôle, mais parce que vous aimez ça.
Soutenu par Gérald Gassiot-Talabot, le peintre Gérard Guyomard s’inscrit dans cette veine, proprement décapante. Le critique écrit à son sujet : Guyomard n’arrête pas d’en rajouter, peut-être en souvenir de l’économie privatiste de l’enfance, par un souci de mettre le plus d’images de côté, comme pour se prémunir contre la pénurie du lendemain pictural. Et il doit trouver son équilibre entre rétention et dépense. Mais Guyomard n’arrête pas non plus d’en enlever, en incluant une iconographie photocopiée, à partir de magazines à forte connotation érotique, dont il édulcore la trace par grattages, frottements, lessivages décapants à l’eau de javel (…) Et pourtant, cette peinture vouée à la sensualité la plus immédiate, qui a connu la simplicité de l’anecdote, de l’auto-histoire, de l’intégration littérale des documents et des souvenirs du voyage, de la référence au quotidien, au hasard des rencontres et des épisodes vécus, est une peinture de contrainte, qui s’impose des règles pour se dépasser et s’accomplir.
Jouer avec les règles… S’il en est un qui s’en est fait une spécialité, c’est bien le peintre tchèque Milan Kunc, qui a très tôt appris à se méfier aussi bien du Réalisme socialiste que de la pseudo-avant-garde en phase terminale. On qualifie généralement sa peinture de réalisme postmoderne et ironique, mais son style a également été appelé Réalisme embarrassant, Punkpop, ou East Pop ; lui se revendique en même temps Pop et Surréaliste, et n’hésite pas à mixer des éléments issus de la publicité, de la photographie, du street art et de la bande dessinée pour dresser la cartographie imaginaire d’un Paradis artificiel vulgaire et léché comme chez Disney ou au Luna Park, aussi pénétrant que les slogans simplistes de la propagande soviétique. Quand on s’arrête à son sens aigu du kitsch, il faudrait approfondir pour saisir son inouï sens de l'observation de nos sociétés postmodernes, dont il dépeint avec volupté les fétiches de la consommation et les fanfares stridentes de l'idéologie.
Après avoir musardé du côté des situationnistes et embrassé la cause Beat, le poète, traducteur et collagiste Claude Pélieu s’est établi à New York, où sa vision du monde (et de l’art) s’est considérablement enrichie. Habitué de la Factory, l’atelier d’Andy Warhol, il y rebat les cartes de sa psychogéographie personnelle, comme il le raconte : J'y ai rencontré tous les gros calibres du pop-art avec qui j'ai vachement bossé. Je me rappelle les soirées avec Tennessee Williams, John Cage, Truman Capote. Et je me souviens d'un jour où j'étais vraiment bourré et où j'ai pissé dans la poche de Norman Mailer.
En mettant tous ces éléments dans notre shaker intime (et alors que nous préparons activement la prochaine exposition de la galerie, précisément intitulée Pops et Surréalistes, réunissant des peintures des débuts de Philippe Mayaux, confrontées à celle de son peintre préféré d’alors, Milan Kunc), il nous est venu l’envie, pour cette nouvelle semaine, d’ouvrir ces Boîtes à fantasmes que tous ces peintres ont consciencieusement remplies à notre intention. Et ça décoiffe !
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