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lun. 13 juil.

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Loeve&Co-llect: Quatorzième semaine, quatorzième thème. Et toujours, chaque jour à 10 heures, du lundi au vendredi, une œuvre à collectionner à prix privilégié, disponible uniquement pendant 24 heures. Collectionner n'a jamais été aussi enrichissant...

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Heure et lieu

13 juil. 2020, 09:59

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À propos de l'événement

Semaine 14: Daprès

Pendant des siècles, la gravure, le dessin ou la peinture d’après les grands maîtres a répondu à un double objectif pédagogique. Jusque dans le troisième tiers du dix-neuvième siècle, la gravure d’interprétation était ainsi en effet le genre le plus répandu de l’estampe, puis la gravure originale et, surtout, la photographie se développèrent, rendant ces variations d’après les maîtres plus rares. Mais la copie est d’abord destinée à la formation du copiste lui-même. Copier, ç’a été l’éducation de presque tous les grands maîtres. [...] On copiait tout ce qui nous tombait sous la main d’œuvres d’artistes contemporains ou antérieurs, écrit ainsi Eugène Delacroix dans son Journal le 20 janvier 1857. Pendant des siècles en effet, la copie d’après les maîtres est demeurée un exercice incontournable, ancré dans l’enseignement académique, et Delacroix lui-même s’est illustré en brillant copiste, arpentant le Louvre pour y apprendre de ses prédécesseurs tels que Rubens, Van Dyck ou Goya, avant de devenir à son tour une source d’inspiration pour ses contemporains et leurs successeurs, dont naturellement Picasso.

Le début du vingtième siècle correspond simultanément à l’essor des reproductions photographiques (auxquelles la couleur apportera un supplément de véracité qui rendra définitivement la gravure d’interprétation caduque) et à l’invention de la notion même d’avant-garde, qui suppose le dépassement voire le rejet des conceptions artistiques antérieures, et rend même la notion de virtuosité technique inopérante. En griffonnant une moustache et un bouc sur le visage de la Joconde en 1919, Marcel Duchamp envoie le coup de pied de l’âne à toute l’histoire de l’art. Ou, plutôt, il le redouble, puisque le canular organisé par Roland Dorgelès en 1910 (attachant un pinceau à la queue de l’âne Lolo, titrant le résultat de son coup d’appendice caudal Et le soleil s’endormit sur l’Adriatique puis l’exposant au Salon des Indépendants, signé Joachim Raphaël Boronali, anagramme d’Aliboron) avait déjà envoyé aux fraises toute prétention à se placer (techniquement) dans les pas (les sabots) des grands maîtres du passé.

Dès lors, tout au long du vingtième siècle les relations entre les artistes contemporains et l’art du passé s’en trouve radicalement modifiée. Il ne s’agit plus alors de révérence béate, ou d’apprentissage passif, mais de citations, d’ironie, de télescopages spatio-temporels... Martial Raysse ripoline en fluo les chefs d’œuvre d’Ingres, Erró met les nus de Boucher sur des sièges d’astronautes, Arman découpe les Vénus en tranches, Alain Jacquet rejoue Le Déjeuner sur l’herbe au bord d’une piscine, tandis que Picasso, donc, décortique Les Femmes d’Alger de Delacroix.

Bien sûr, taquiner demeure un exercice d’admiration comme un autre, et Marcel Duchamp le premier reconnaît sans détour sa dette vis-à-vis des grands artistes qui l’ont précédé, comme Manet, 2/9 dont il dit à Pierre Cabanne: Le grand homme c’était lui, mais aussi ses contemporains, à commencer par Matisse, déterminant dans sa vocation de peintre: Oh! C’est Matisse évidemment. Oui c’est lui qui est à l’origine. [...] ses toiles du Salon d’automne m’avaient énormément touché. Bien après les ready-made au demeurant, parmi les dernières œuvres de Duchamp figurent ces bouleversantes gravures sur papier japonais, Morceaux choisi d’après Ingres, qui disent toute l’ambivalence de la relation de révérence/irrévérence des avant-gardes du vingtième siècle à la grande peinture du passé.

Il est manifeste que, depuis les années 1950, la peinture ancienne est perçue par l’art contemporain à travers le prisme médiatique. Gherasim Luca (pour ses Cubomanies), Jirí Kolár ou Pol Bury citent explicitement des œuvres du passé, certes, mais à travers leurs reproductions mécaniques, en triturant des impressions, en interrogeant simultanément l’aura des œuvres et leur circulation dans la société spectaculaire marchande. Alain Jacquet procède de même en soumettant des tableaux iconiques comme Le Déjeuner sur l’herbe, mais aussi La Source ou La Naissance du Printemps non seulement à un processus de remake proprement dégradant mais aussi à un tramage quadri excessivement agrandi qui en souligne la dimension d’artefact. Autre grand détourneur, Martial Raysse place au centre de sa forme en liberté une Joconde, certes, mais une Joconde à l’intérieur d’un téléviseur couleur, icône dérisoire d’un folklore planétaire dans lequel l’art a été absorbé par le kitsch généralisé. Pourtant, ces réappropriations revitalisent également leurs modèles, en réaffirmant leur charge initiale, à l’image du tableau de l’École de Fontainebleau choisi par Rebecca Horn pour incarner la Beauté par excellence, qu’elle place au centre d’une machine célibataire pour en réactiver la dimension morale. En effet, la représentation allégorique de la beauté, célébration de l’érotisme et des charmes de l’amour, nous met également en garde contre les illusions des sens, l’inconstance des sentiments et la fugacité des apparences. Cette ambiguïté même fait le sel de l’existence, et de notre relation aux chefs- d’œuvre du passé, qui nous enchantent autant qu’ils nous menacent.

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