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Love&Collect: Duos sur étiquettes
lun. 07 déc.
|https://www.instagram.com/loveandcollect/
Love&Collect: Trente-cinquième semaine. Chaque jour à 10 heures, du lundi au vendredi, une œuvre à collectionner à prix privilégié, disponible uniquement pendant 24 heures. Collectionner n'a jamais été aussi enrichissant...
Heure et lieu
07 déc. 2020, 09:59
https://www.instagram.com/loveandcollect/
À propos de l'événement
Semaine 35: Duos sur étiquettes
Créée en 1972 au Théâtre Michel, avec Darry Cowl et Daniel Prévost, la pièce Duo sur canapé nous a inspiré le titre de cette nouvelle semaine. Nous avions aussi pensé à Leurs galeries et leurs peintres, pour paraphraser le titre du passionnant livre d’entretien de Francis Crémieux avec Daniel-Henry Kahnweiler (préface du grand historien d’art Étienne Fermigier). Paru pour la première fois en 1961, cet ouvrage, avec une poignée d’autres que nous vous recommandons –ils font également d’excellents cadeaux de Noël– (Souvenirs d’un marchand de tableaux d’Ambroise Vollard, La Passion de l’art d’Ernst Beyeler, Iris Time d’Iris Clert, Claude Berri rencontre Leo Castelli ou Comment je suis devenu marchand de tableaux de Sami Tarica) ouvre une fenêtre captivante sur la manière dont ces grands passeurs ont construit leur relation unique à l’art et aux artistes.
Naturellement, l’œuvre est tout, et plaide pour elle-même. Pourtant, parfois, aperçue à l’arrière, sur le châssis, ou en-dessous, collée au socle, une étiquette lui donne une couleur locale, une saveur particulière. On sait d’ailleurs qu’une œuvre de Picasso passée entre les mains d’Ernst Beyeler bénéficie d’une surcote par rapport à des œuvres apparemment équivalentes, tant l’œil du grand galeriste est devenu légendaire. Un observateur est même allé jusqu’à saluer: Il y a des marchands qui font de l’argent avec de l’art, d’autres, très rares, qui font de l’art avec de l’argent. Beyeler est de ceux-là.
Une étiquette suffit, et c’est l’histoire qui se met en marche! Un nom de galerie, un titre, une dédicace, une mention d’exposition ou d’appartenance à une collection, et l’historien de l’art tapi en nous s’emballe... La semaine dernière, par exemple, consacrée à la danse sous le titre Corps et graphies, nous a ainsi emmené sur des chemins riches et aventureux: un dessin de Serge Lifar nous a conduit à la ballerine Yvette Chauviré, qui en était la dédicataire, un autre de Serge Charchoune nous a conduit à explorer l’histoire de la Galerie La Danse, créée par la grande passionnée Gilberte Cournand, celui de Lucinda Childs nous a mené à Bénédicte Pesle, introductrice décisive de l’art américain en Europe, tandis qu’une encre de Max Ernst nous a remémoré l’importance de Gertrud Leistikow dans la réinvention moderniste de la chorégraphie.
À la manière de celles qu’on collait sur les malles, les étiquettes nous font rêver et voyager. C’est pourquoi nous avons décidé de leur dédier cette nouvelle semaine, à travers cinq duos particulièrement emblématiques, qui réunissent des artistes d’exception, pionniers et piliers du Surréalisme, de l’art singulier, du Nouveau Réalisme ou de Support(s)/Surface(s), et des marchands légendaires des années 1960 qui, comme Ernst Beyeler, ont fait de l’art à leur manière, et joué un rôle déterminant dans certaines des aventures artistiques les plus fantastiques du siècle.
Un seul amateur d’Art Brut n’a-t-il pas rêvé de remonter le temps pour visiter la cave de la Galerie René Drouin, où André Breton, Jean Dubuffet, Jean Paulhan, Henri-Pierre Roché et une poignée d’autres posèrent les bases de la reconnaissance de cet art autre? Et Mathias Fels? La simple évocation de sa galerie suffit à évoquer presque toute la Figuration Narrative, mais pas que: c’est là aussi que le public français découvrit un certain Francis Bacon. Et Daniel Cordier, qui vient de nous quitter? Une vie de légende, huit petites années de galeriste audacieux et clairvoyant, qu’il clôt en prenant congé par une lettre implacable intitulée Huit ans d’agitation, dans laquelle il dénonce: En France, il n’y a jamais eu, depuis le XIXe siècle, de collectionneurs pour l’Art de leur temps. Où sont les collections françaises d’Impressionnistes, de Cubistes, de Surréalistes ou d’Art Abstrait, qui sont l’orgueil des collectionneurs suisses, allemands ou américains? Le véritable goût des collections françaises, c’est à la suite des Bouguereau ou Carolus Duran, pour Dunoyer de Segonzac, Brianchon, Buffet, Brayer, etc., qu’il s’exprime, c’est-à-dire pour une peinture traditionnelle sans lyrisme et sans vérité mais aussi sans danger. Et Claude Givaudan? Le Centre Pompidou rend hommage en ce moment à ce flamboyant éditeur, un vrai seigneur, compagnon de route d’Erró et de Marcel Duchamp, issu d’une famille de parfumeurs il permit à Martial Raysse de diffuser sa propre fragrance, sous le beau nom de Démocratie. Homme de bonne chère, il organisa aussi le fameux repas en quatre couleurs concocté par les traiteurs coloristes Dorothée Selz et Antoni Miralda, après avoir édité l’année précédente la fameuse (au sens de célèbre...) boîte de Conserve expansion, série Alimentation de la vision, cosignée par César et Martial Raysse. Quant à Jean Fournier, passé de la librairie à la galerie, il incarne à jamais LE goût porté au sommet de la poésie et de l’élégance, dans son vaste espace immaculé et éblouissant à un jet de pierre du Centre Pompidou, où éclataient les couleurs incandescentes de Joan Mitchell, Sam Francis, Claude Viallat ou Simon Hantaï.
Les étiquettes au verso des œuvres sont si inspirantes que des artistes en ont même fait le sujet de leurs œuvres, à l’instar du photographe français Philippe Gronon qui, depuis 2005, immortalise les versos de toutes sortes de peintures, qui s’avèrent captivants... À tel point que, comme le souligne le critique Hubert Besacier, l’approche est périlleuse parce que, dès que l’identité du recto se précise et dès que les informations qu’il véhicule se font plus nombreuses ou plus remarquables, l’intérêt documentaire s’accroît et menace de l’emporter. Plus cet intérêt est grand, plus le regard et l’attention portés à l’œuvre photographique sont différés. Cette prévalence de l’anecdotique est forcément accentuée par la notoriété, la popularité du référent.
Démarche identique chez son collègue brésilien Vik Muniz qui, en 2016 au musée Guggenheim de New York découvre le dos de La Repasseuse de Pablo Picasso: c’était comme regarder une personne nue, décrit-il. Le cadre dépouillé en bois brut de La leçon d’anatomie du docteur Tulp, de Rembrandt, La nuit étoilée de Van Gogh, La jeune fille à la perle, de Johannes
Vermeer, ce sont les tableaux les plus célèbres que Muniz s’est depuis efforcé de déshabiller en les photographiant...
Cette fascination des artistes, et des regardeurs, pour les envers de tableaux n’est pourtant pas nouvelle. Au Statens Mueum for Kunst de Copenhague, on peut ainsi admirer une curieuse huile, peinte par Cornelis Norbertus Gysbrechts, vers 1670. Mesurant 66,4 cm de hauteur sur 87 cm de largeur, il s’agit d’un trompe- l’œil représentant le dos d’un tableau à l’échelle un: les cadres intérieur et extérieur en bois d’un tableau fictif sont visibles, ainsi que l’arrière de sa toile. Des petits clous fixent le cadre intérieur au cadre extérieur. Sur la toile, un morceau de papier indique sobrement le numéro d’inventaire: 36.
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