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Love&Collect: New Domestic Landscape

lun. 15 mars

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https://www.instagram.com/loveandcollect/

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Heure et lieu

15 mars 2021, 09:59

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À propos de l'événement

Semaine 49: New Domestic Landscape

Pour la première fois, nous consacrons entièrement notre semaine thématique à une exposition mythique du passé, Italy: The New Domestic Landscape, qui s’est tenue au MoMA de New York du 26 mai au 11 septembre 1972, dont le musée américain a l’excellente idée de mettre le catalogue légendaire, épuisé depuis longtemps, en accès libre sur son site (accessible en suivant ce lien.

Rendant compte de l’ouverture, le New York Times souligne à l’époque le caractère historique de l’exposition: L'éventail des réactions était inhabituellement large – de l’enthousiasme absolu à l’ennui manifeste, en passant par les critiques acerbes – parmi les premiers contingents de visiteurs ressortant de l’exposition, à la fois la plus démesurée et la plus coûteuse (1,5 million de dollars) des 43 ans d'histoire du MoMA. Car cette exposition n’est comparable à aucune autre. Et cela, les personnalités des mondes de l'art, de l'architecture, du design, des musées et de la société civile le percevaient toutes en assistant, depuis mardi soir, à l’un des nombreux vernissages et avant-premières. Cité par le quotidien, l’arbitre absolu, l’architecte Philip Johnson, si lié au MoMA, tranche sans ambigüité: Mon sentiment est que cette exposition révèle le premier mouvement moderne depuis le Bauhaus. C'est le premier grand mouvement, en fait, qui nous fait voir la Barcelona Chair de Mies van der Rohe non pas exactement comme dépassée, mais pour ce qu'elle est – un classique.

Mais que montre l’exposition? Imaginée par l’architecte argentin Emilio Ambasz, alors conservateur chargé de l’architecture au MoMA, elle a été pensée sur la base d’une simple intuition : depuis une dizaine d’années, une nouvelle génération de designers italiens fait souffler en Europe un vent nouveau, avec leurs meubles et objets colorés, sexy, gonflés même parfois, multipliés comme à l’infini par la grâce d’industriels transalpins visionnaires, qui excellent à s’emparer de nouveaux matériaux, au premier rang desquels le plastique, qui permet des audaces, de formes comme de couleurs, impensables auparavant.

Tentaculaire, démesurée, encyclopédique et audacieuse, l’exposition débute par une première partie plutôt classique dans son contenu, la présentation de plus de cent cinquante meubles et objets qui témoignent de la vitalité du design italien à un moment où les grands créateurs nés dans la première moitié du siècle travaillent en binômes avec des entreprises artisanales ou industrielles en pleine expansion (Artemide, Cassina, Kartell…), mais à la scénographie déroutante, se déployant dans des capsules disposées dans les jardins du musée. Cependant c’est la seconde section, réservé aux environnements, qui défraie la chronique et déboussole les visiteurs, tourneboulés par la vision futuriste de l’habitat occidental qui s’en dégage. En effet, porté par son intuition (alors qu’il connaît très mal cette scène), Ambasz a saisi un moment historique: les designers qu’il a invités ne sont plus de simples concepteurs d’objets plus ou moins innovants, mais mènent une véritable réflexion de fond sur le contexte domestique.

Deux tendances se dégagent: d’un côté un design radical, d’inspiration marxiste, s’oppose frontalement au capitalisme et à la consommation de masse, et d’un autre une pensée plus hédoniste de l’intimité domestique, mobilisée pour mettre en scène l’aspiration de la jeunesse post-68 pour un monde moderne, marqué par une nouvelle approche du confort, l’emploi de matériaux et de techniques novatrices, et même l’inclusion des nouveaux médias dans l’espace de vie lui-même.

Les réalisations marquantes ne manquent pas, de la Kar-a-Sutra de Mario Bellini, pensée comme le véhicule automobile rêvé pour nomades hippies, à la Gray Roomdu collectif Archizoom, un espace vide accueillant une voix de femme, qui décrit une belle maison chamarrée dans laquelle on évolue librement, sans obstruction, tandis que Gaetano Pesce livre avec Project for an Underground City in the Age of Great Contaminations une vision postapocalyptique d’un habitat pour douze survivants à un accident écologique majeur.

Alors que le design italien est intrinsèquement lié au monde industriel, il est simultanément sans doute plus artistique que nul autre. La raison en est sans doute la grande perméabilité à l’art (et à la collection) dans toute l’Italie, mais aussi la présence de personnalités historiques fortement liées aux deux disciplines, telles les peintres Lucio Fontana (qui a lui-même proposé des environnements lumineux et collaboré étroitement avec la firme Tecno sur des lignes de mobilier), le visionnaire Dino Gavina (qui a initié la production industrielle de design en s’appuyant sur les pionniers du Bauhaus, mais a également créé le laboratoire de recherche expérimentale Centre Duchamp, et édité le mobilier surréaliste) ou Bruno Munari (adepte tardif du Futurisme, élève de Max Bill et partisan d’un art de tous).

Dans ce registre, une personnalité est centrale, qui a fait le lien entre les milieux du design avant-gardiste et de l’art contemporain, dont la frontière est particulièrement floue en cette fin des années 1960 et ce début des années 1970, où l’Antidesign et le design radical cousinent avec l’Arte Povera ou le Minimal Art, et s’aventurent même du côté de la performance ou du Land Art: la critique d’art Lea Vergine.

Dès ses débuts, dans les années 1960, elle s’est fréquemment et frontalement opposée à un monde de l’art profondément patriarcal. Par exemple, elle avait donné une conférence à l’Académie des beaux-arts de Naples lors de laquelle elle était assise derrière une table qui laisse ses jambes visibles (à un journaliste qui insinua que les gens étaient venus pour voir ses jambes, pas pour l’écouter, elle intenta un procès, et le gagna). À une autre repise, alors qu’âgée de vingt-six ans, elle rédigeait le texte d’une des premières expositions sur Lucio Fontana à Naples, l’écrivain Luigi Compagnone s’indigna de sa vision trop sexuée de l’œuvre de Fontana, et l’accusa de perversion; nouveau procès.

Proche de personnalités comme le critique Gillo Dorfles ou Arturo Schwartz (le marchand qui a ressuscité les ready made de Duchamp), Vergine épouse Enzo Mari et informe les jeunes designers italiens sur les multiples avant-gardes qui bourgeonnent alors, tant en Europe qu’aux États-Unis, publiant notamment des ouvrages de référence sur l’art corporel (en 1974) ou l’art politique (en 1976). On lui doit également le premier travail critique d’envergure sur les artistes femmes, qu’elle formalise par une exposition itinérante et un livre retentissant: L'altra metà dell'avanguardia, 1910-1940, pittrici e scultrici nei movimenti delle avanguardie storiche (L'Autre moitié de l'avant-garde, 1910-1940: peintres et sculptrices dans les mouvements d’avant-garde historiques). Résumé en 1988 dans son ouvrage L’art in gioco, l’exercice critique selon Lea Vergine est un art: La critique implique compromis et lutte, et non accès de tolérance en vue d’une coexistence pacifique : elle ne peut se limiter à rendre compte de ce qui est (par une analyse empressée ou un traitement para-épistémologique), mais doit s’aventurer à imaginer ce qui doit être. La critique ne peut être expérimentale; l'utopie oui. Le problème est que, dans la plupart des cas, nous sommes confrontés à des transpositions littéraires du visible, alors que la critique d'art est – pour paraphraser Doubrovsky – une branche à part entière des arts visuels, qui a pour objet les arts visuels...

Dans son introduction à la section Environnements du catalogue de The New Domestic Landscape, le commissaire Emilio Ambasz résume l’enjeu majeur de l’exposition de 1972: Il devient manifeste que ni les expérimentations d'aujourd'hui ni la vision de demain ne peuvent être appréciées au détriment les unes des autres, et que la recherche d’une certaine qualité de vie quotidienne ne peut se permettre de négliger les problèmes concomitants: pollution, détérioration de nos villes et de nos institutions, et pauvreté. Il s'agit donc de concilier la vision d'ensemble avec les exigences du moment, de prendre conscience à la fois de l'objectif, ce long voyage, et des responsabilités quotidiennes, en cours de route...

Il y a presque cinquante ans, The New Domestic Landscape a proposé une vision prospective de l’art et du design qui a profondément, mais souterrainement, rebattu les cartes des relations entre les deux disciplines. Parmi d’autres, Enzo Mari, Bruno Munari, Gaetano Pesce, Ettore Sottsass ou Nanda Vigo ont trouvé leur place dans le champ artistique et théorique et sont désormais l’objet d’expositions majeures, dans lesquelles leur œuvre dialogue avec celle d’artistes de la nouvelle génération, à l’image de la grande rétrospective actuellement consacrée par Hans Ulrich Obrist et Francesca Giacomelli à la Triennale de Milan, où des hommages sont rendus au génial designer, disparu fin 2020, par des personnalités comme Tacita Dean, Dominique Gonzalez-Foerster, Rirkrit Tiravanija, Danh Vō, et même Virgil Abloh.

Enzo Mari aurait-il apprécié ce retournement ironique à sa juste valeur? Dans le catalogue de The New Domestic Landscape, il prophétisait: la seule entreprise digne pour les artistes est celle de la recherche linguistique, c'est-à-dire l'examen critique des systèmes de communication, et de la manière dont les besoins primaires de l'homme (plutôt que les idéologies en tant que telles) sont analysés – et presque toujours manipulés. C'est pourquoi les artistes, et ceux qui gravitent autour, ne doivent pas se contenter d'expérimenter et de concevoir de nouveaux modes d'expression, mais doivent se préoccuper prioritairement de la manière dont la substance comme les implications de leurs recherches sont communiquées et reçues; ils doivent surtout en permanence évaluer qui sont leurs interlocuteurs. Seule une campagne d'information rigoureuse et constante peut réussir à réduire la marge de manipulation à laquelle le travail du chercheur est désormais exposé et, par conséquent, contribuer à détruire le mythe culturel de la classe dominante. Mais comme ils sont, en fait, si mal conditionnés qu'ils sont de connivence avec la classe dominante, les artistes finissent par dissimuler cette connivence dans une sorte de jargon formel et, pire encore, dans des arguments qui sont souvent justifiés comme étant marxistes...

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